Le PEDT, cheval de Troie des collectivités locales dans l’éducation nationale !

 

Territorialisation

Le PEDT, cheval de Troie des collectivités locales

dans l’éducation nationale!

Un engagement contractuel

Le PEDT est le prolongement et le développement des Plans Éducatifs Locaux instaurés dans les années 90. Il associera donc à la collectivité territoriale les acteurs intervenant dans le domaine de l'éducation, administrations de l'État concernées (dont éducation nationale, mais aussi sports, jeunesse, éducation populaire et vie associative, culture, famille, ville… sont citées), associations, notamment d'éducation populaire, institutions culturelles et sportives…

Le PEDT constitue alors, pour tous ces partenaires, un engagement contractuel définissant le cadre de leur collaboration : le périmètre du territoire concerné, la durée de l'engagement, les objectifs, les priorités retenues, les effets attendus sur le territoire, ou encore la méthodologie (diagnostic, qualification des intervenants, évaluation). Le pilotage partenarial est censé  permettre d'assurer la complémentarité des dispositifs portés par les différents acteurs : contrats locaux d'accompagnement à la scolarité (Clas), contrats "enfance jeunesse" (CEJ), volet éducatif des contrats urbains de cohésion sociale (Cucs)…

Le PEDT doit, selon le ministère, " mobiliser toutes les ressources d'un territoire afin de garantir la continuité éducative entre les projets des écoles et des établissements et les activités proposées aux élèves en dehors du temps scolaire*". Il est présenté, comme un cadre fédérateur censé « en respect[er] le domaine de compétences de chacun ». Les conséquences ? De grandes disparités en prévision…

Disparités dans son financement 

Le ministère compte utiliser les fonds de la CNAF pourvoyant déjà aux financements des centres de loisirs. En dehors du fait que ces derniers sont épuisés, ils ne sont versés qu’aux structures payantes. Au cas présent, il y aurait donc des prises en charge gratuites ou payantes en fonction que les élèves soient avec un enseignant ou un animateur …

Par ailleurs, si certaines communes fiscalement bien pourvues pourront se permettre d’assurer la gratuité, la grande majorité est exsangue depuis la réforme de la taxe professionnelle.

Disparités dans les horaires

Le PEDT les définit et prévoit l’organisation du péri-éducatif avant et après la classe. Les horaires sont modulables dans la limite de 5 h30 d’enseignement (3h30 pour le mercredi) ; l’amplitude de la journée variera d’une commune à l’autre avec la possibilité d’étendre la pause méridienne au-delà des 1h30 minimum. La prise en charge des élèves jusqu’à 16 h30 serait assurée via les APC (Activités Pédagogiques Complémentaires) ou le périscolaire.

Disparités dans les contenus des APC

Un certain nombre de pistes sont avancées par le ministère ; maîtrise de la langue en maternelle ; en élémentaire ? Français et maths par la manipulation, l’entrainement et la systématisation ou encore aide au travail personnel et méthodologie… Bien loin des activités culturelles annoncées initialement! D’ailleurs, les communes n’ont pas du tout ces objectifs-là, conscientes qu’elles n’auront pas le personnel qualifié pour le faire. Ce sera sport ou sport…

Disparités dans ses acteurs

Les collectivités qui le souhaitent peuvent mettre à disposition des équipes pédagogiques, des intervenants  extérieurs dans le cadre des APC, sous la responsabilité des enseignants. Ceci s’applique bien évidemment si le PEDT est effectif et si les communes ont les moyens de financer ces mesures. La qualification des dits intervenants est laissée à l’appréciation des communes… L’Etat propose également que l’on recoure aux Emplois-avenir ! En matière de chiffres pour l’emploi, on n’est jamais mieux servi que par soi-même…Si nécessaire, la collectivité pourra recourir aux ATSEM, qui seraient alors pris en compte dans les taux d’encadrement au même titre qu’un animateur**.

Tout cela via le PEDT !

"Le PEDT formalise l'engagement des différents partenaires de se coordonner pour organiser des activités éducatives et assurer la cohérence des actions conduites sur l'ensemble des temps de vie des enfants. »

Ce projet doit être mis en place par les municipalités. Il marque ainsi la volonté du ministère de laisser une place très importante aux collectivités territoriales. Il a deux objectifs majeurs : la synergie entre les acteurs, mais aussi la lutte contre les inégalités scolaires.

L’idée d’une coordination pour une meilleure visibilité des activités proposées peut se défendre. Toutefois, cette coordination « à tous les niveaux » entre éducation nationale et collectivités, présentée comme impérative, ne risque pas de se faire correctement d’ici la rentrée prochaine. De même, le cadre local pour lutter contre l’inégalité scolaire n'est pas forcément le plus approprié. Le traitement de l’inégalité scolaire est de la responsabilité nationale et doit être porté par un projet national.

Quid de la qualité des activités proposées aux enfants après la classe en particulier ? Quid du coût sur le long terme pour les municipalités ? Comment résoudre le manque de locaux, de personnel d’encadrement qualifié ? Comment garantir des taux d’encadrement corrects, alors qu’ils sont revus à la baisse pour contenter les collectivités locale ? Trop de points non clarifiés !

De plus, l’incidence que pourrait avoir le PEDT dans les APC, va entrainer la confusion entre ce qui relève de la responsabilité de l'Etat (missions des enseignants) ou des municipalités, et accroitre les inégalités entre élèves de communes riches et élèves de communes plus pauvres.

Il est clair qu’il se basera sur les propositions locales. On repère bien là, la volonté de l’État de décentraliser  certaines de ses compétences aux collectivités.

Les projets d'école incluant ou non des demandes de dérogation devront être transmis au plus tard courant mars 2013, accompagnés le cas échéant des principes du PEDT.  Or, cela ne sera en réalité pas possible car la plupart des conseils d’école sont programmés pour le mois d’avril.

Au final, si le PEDT ne municipalise pas les enseignants, il organise bien une rupture de l’égalité de traitement des élèves sur le territoire.

La CGT Éduc’action revendique la gratuité du périscolaire et la création d’un fond national de péréquation. Elle demande l’abandon de la Loi Peillon et de réforme Peillon des rythmes !

Fabienne CHABERT

*Écoles maternelles et élémentaires, Organisation du temps scolaire dans le premier degré et des activités pédagogiques complémentaires, circulaire n° 2013-017 du 6-2-2013.

** Guide pratique pour accompagner les élus - La réforme des rythmes à l'école primaire édité par le ministère de l’éducation nationale